dimanche 14 décembre 2014

La Forme du voyage


Les films de papier

Dans son numéro 7 daté du printemps 1994, pp. 141-163, l'éphémère revue « Politiques », aux éditions Quai Voltaire à Paris, publie la première partie d'un récit du voyage accompli l'été 1993. La voyageuse avait choisi de suivre la frontière de l'ex-Urss, de la Pologne au delta du Danube, côtoyant des pays neufs pour elle, des pays si proches et si étranges.
Le récit de ce premier voyage en terr(A)INconnu(e) se veut « film de papier » et se présente sous la forme de planches : la page de gauche organise une sorte de voix-off assez sage et littéraire (une voix-off très marquée par celles des films de Chris. Marker) tandis que la page droite suit le récit oral du même voyage, plus impétueux, plus immédiat.
Il était déjà question de frontières, de voix, il était déjà question de la forme à donner à ces voyages aux frontières.
Le récit s'intitule « La Forme du voyage »















samedi 6 décembre 2014

mardi 30 septembre 2014

Le Chemin des Dames, page 18


Description d'un projet:


Reprendre les chemins d'ici, être « rendue au sol » au cours de traversées à la recherche de traces, de contours et de frontières invisibles. Les photographies montrent la persistance de la boue, de la terre, du sol. Elles traduisent  le besoin de retrouver une langue qui fasse corps, une langue qui épouse le paysage. La marche fouille la boue, le chemin devient personnage, il se dresse, il fait face. L'appareil photographique le cadre comme pour un portrait, le redresse. Assez vite revient la nécessité de reproduire ces marches par un dialogue créé entre deux séries d'images. Une première série de photographies, en noir-et-blanc, accumule paysages, sols heurtés par les souliers, boue, arbres, images silencieuses faites lors de longues marches solitaires à proximité du Chemin des Dames. Elles portent les traces muettes de ces paysages où les arbres n'ont que cent ans mais témoignent aussi de cette vie à ras-terre, de l'attention portée par celle qui marche aux cailloux, aux empreintes, aux éclats… Elles portent aussi les traces de ces nuits mal dormies, joue contre sol, dans la chaleur de l'humus des forêts, traces de ce qui est là, obstinément là. L'autre série de photographies montre, en couleurs, les petits soldats dans des tableaux guerriers contemplés par la fillette qui les a peints. Les tirages sont d'un format plus petit, comme des jouets, et ils sont disposés en bandes afin de constituer une sorte de voix off.
Pour le moment, le mode de présentation de ce montage n'est pas décidé : livre-accordéon ? Long ruban ?
Ce projet fait partie des coups de cœur des lectures de portfolios, Manifesto 2014:
 http://www.festival-manifesto.org/manifesto-2014/evenements-124/les-coups-de-coeur-des-lecteurs

 

samedi 17 mai 2014

Vers le blanc





Tu marches. Cela ne monte pas, cela grimpe. Les arbres exultent, les feuilles se déplient: la sève, partout. Pétales des cerisiers en fleurs, blancheur des troncs des bouleaux. Les neiges font cascader les torrents.








Un peu plus tard,  tu marches sur la plage. Le sable est chaud, l'air encore vif. Tu touches l'eau, tu n'y penses pas, tu la touches et ne la trouves pas froide. Tu marches dans l'eau, en direction du phare, il n'y a que l'horizon, la mer en allée avec le ciel, tu n'y pensais pas mais tu en as envie, elle est puissante, les vagues forment une légère écume, l'envie est désormais impétueuse. Tu formes un petit tas de tes vêtements sur le sable et tu entres nue dans la mer, plonges ton corps. Quelques minutes plus tard, tu revêts tes habits et le vent te sèche tandis que tu reprends ta marche.

samedi 10 mai 2014

Vertical Sleepers, a disLOCATION









Vertical Sleepers, a disLOCATION



They don't have any clue about the mental gesticulation happening in your mind you dislocate the three dimensions you redresses tout, you redress everything constamment tu vois vertical ce qui est couché constamment tu fight constamment tu te bats you straighten everything up tu tords les


lignes de fuite



 
tu refuses la réalité you straighten things out tu la redresses,
redresseuse de torts Ils dorment You put the wrongs right
redresseuse de corps (la vieille rengaine, ta vieille histoire, les terreurs d'enfance, le vieux désir de la voir marcher…) always that same old story that bonesetter's thing
disloqués
rebouteuse




disLOCATION déplacements de perspective, déplacements, écartèlement entre deux lieux displacement
terrainconnu




Vertical Sleepers, a disLOCATION









La mélancolie des images






Paris, mars 1989, dans le numéro 417 des Cahiers du cinéma, tu publies un de tes premiers articles, il est consacré au film Khandar, « Les Ruines », de Mrinal Sen. Tu y parles de la mélancolie de l'acte photographique. Tu imagines sans doute l'Inde comme un pays de chaleur, de poussière et de vieux tombeaux à parcourir. Tu découvriras plus tard de telles tombes, tombes mogholes, dans la verdure des parcs de Delhi.


Kolkata, juin 2005, sur la chaîne de télévision regardée dans ton hôtel un jour de chaleur humide – la mousson est toutefois peu virulente cette année-là, Mrinal Sen est filmé visitant ton exposition de dormeurs, au Seagull Arts and Media Resources Centre.




Terr(a)inconnu(e)





TERR(A)INconnu(e)

Mai 2014, tu viens de lire Partir, Calcutta, de Dominique Sigaud, et c'est tout Calcutta-Kolkatta qui t'est revenue, Calcutta-Kolkatta marchée l'hiver 2005, puis Calcutta-Kolkatta marchée sous la mousson de l'été 2005. L'odeur de la pluie, de la moisissure, les rues envahies la nuit par les dormeurs, le Maidan rendu à la pluie, le linge qui ne sèche pas. L'écriture parvient à traduire ce qu'on peut retrouver comme étrange familiarité dans cette ville verticale, une ville familière par ses matières, ses métiers sortis d'une mémoire ouvrière ou paysanne, une mémoire de peu, mais une ville éloignée par les fantasmes qu'on en a – MD, jamais allée à Calcutta. Une ville béance, entre extrême matérialité et irréalité des fantasmes littéraires qui lui ont donné l'étoffe de nos rêves.

samedi 19 avril 2014

Recherche du pronom


Tes tomates ont fleurs et fruits: une rouge déjà. La mer est froide mais le sable doux à la joue.
S'engouffre le vent dans le golfe, une grande lassitude.

Il avait roulé une cigarette extrêmement fine. Il semblait essayer de l'amincir encore et encore. Il la portait à ses lèvres, la fumée te gênait, lui piquait les yeux, qui brillaient et témoignaient de son plaisir à parler de ses canaris. Il parlait de ses canaris, il attendait le TGV, il te voyait transporter tes plants de piments, il voyageait avec une cage couverte d'un tissu — vous comprenez, parfois la peur les tue.

Tu es partie, aussi simple qu'inconcevable, tu es partie.
Tu es venue t'agenouiller, un soir, ta joue posée sur mon genou, tu me serrais les mains, tu as parlé je ne pouvais entendre.
Quand je suis sortie de la nuit rouge, j'ai pris ton absence de plein fouet, il neigeait sur les oliviers.

Tu grattes